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Les champs de pissenlit

L'autonomie et la liberté

  • Photo du rédacteur: Nicole
    Nicole
  • 16 mars 2022
  • 3 min de lecture

Dernière mise à jour : 24 août 2022

La conscience de notre existence propre et donc de nos facultés à devenir autonome et à agir en liberté, est dépendante de plusieurs facteurs.

Les temps précédents ont beaucoup insisté sur les aspects relationnels et psychologiques qui conditionnent nos comportements et notre façon d’être au monde. Il y a eu cette tendance à « psychologiser » à outrance la société, rendre l’individu responsable principal, sinon unique, de ce qu’il vit. Mais d’autres facteurs interviennent également, que l’on oublie facilement et qui sont d’ordres culturels et sociaux. Notre façon d’être en société est empreinte de toutes les influences historiques, culturelles et religieuses véhiculées en nous-mêmes et dans notre entourage proche ou plus lointain, cette imprégnation de la culture ambiante. Or, si l’individu a souvent des difficultés à oser se regarder dans ses forces et ses faiblesses, il est encore plus difficile pour un corps social de reconnaître ses fondements et ses fonctionnements avec les effets pervers induits. L’individu peut évoluer et se mettre en cause, même si cela est difficile pour certains. Parfois même il doit se modifier, on exige cela de lui, (pression sociale ou familiale). La société, elle, quelle qu’en soit sa forme et sa taille, et composée de cette foule représentée par l'opinion public si bien utilisée par tant de médiateurs, ne peut pas, ou avec d’énormes craintes. Le risque semble trop grand de la voir vaciller, voire même s’effondrer entrainant un grand désarroi pour les individus qui la composent. L'interaction individu-société fonctionne dans un rapport exponentiel. Les craintes et passivité de chacun ne s'additionnent pas, elles se multiplient au niveau du corps social. C’est ainsi que, sur un même continent, les siècles s’enchaînent les uns ou autres sans grandes métamorphoses. Un certain immobilisme intellectuel et social se perpétue, au niveau du plus grand nombre.


Cependant, ce que nous sommes et la conception que nous avons de notre espace de liberté et d’initiative, sont directement liés à la conception que nous avons du monde, au regard philosophique ou métaphysique que nous avons choisi volontairement ou que nous avons adopté par héritage, en conscience ou fortuitement.

Alors, la question que je me pose depuis longtemps, est de savoir comment un pays, une nation, notamment la France que je connais mieux, choisit une option de pensée et d’organisation plutôt qu’une autre et s’y maintient ? Pourquoi d’autres formes d’organisation ou d’autres références comportementales ont tant de mal à voir le jour et à se maintenir ? Repérer comment l’individu-citoyen se maintient piégé dans un système particulier et parfois même s’y complait ou, pire encore, s'y accroche dans un sectarisme forcené et ce, quel que soit le courant de pensée idéologique ou religieuse qu'il émet. J'ai l'image d'une grande bulle invisible qui nous contient tous et nous influence. Sauf que cette bulle n'est pas qu'extérieure, elle est aussi à l'intérieur de nous, complètement intégrée, d'où la difficulté pour la débusquer. Malgré et au-delà nos divergences politiques, idéologiques, religieuses ou autres, nous sommes tous imprégnés, souvent inconsciemment, d'une pensée-vision globale dont nous ne pouvons-nous défaire, base et limite de notre être penseur, acteur et citoyen. Chacun s'agite à sa manière se croyant libre alors qu'il patine dans cet inconscient collectif depuis des siècles et dont se nourrissent les habitus,[1] tous ces acquis de connaissances et de comportements sociaux incorporés telle une seconde nature. Rares sont ceux qui vont puiser jusqu'à cette dimension, la compréhension d'eux-mêmes et du monde avoisinant.

"Les hommes se croient libres parce qu'ils ont conscience de leurs volitions et de leur appétit, et qu'ils ne pensent pas, même en rêve, aux causes qui les disposent à désirer et à vouloir, parce qu'ils les ignorent."[2]


L’autonomie, même relative, permet d’accéder à la liberté de penser, d’agir, d’avoir, de faire et d’être par soi-même. Sortir de la dépendance de ce et de ceux qui nous entourent, assurer son libre-arbitre et ses propres choix. C’est-à-dire s’assumer en tant que sujet spécifique, au milieu des autres et dans un rapport d’individuation. Mais cette posture est sous-tendue par la conception intellectuelle, philosophique et/ou religieuse que nous avons. Quelle liberté ? Liberté acquise, conquise ? Liberté offerte, comme un cadeau généreux ou comme marchandage ? Ou encore comme potentiel à exploiter ? Le concept de liberté est en rapport direct avec celui d’autorité. Les deux sont intimement liés. D’où vient cette possibilité d’exercer ma liberté ? De moi ? De quelqu’un ou de quelque chose extérieur à moi ? Et quels en sont les freins ?

Nous sommes au cœur du rapport que l’individu entretient avec lui-même et avec le monde qui l’entoure ; dans la dialectique permanente entre ces deux éléments fondamentaux pour l’être humain par définition être social.


[1] Cf. Pierre Bourdieu, Esquisse d'une théorie de la pratique, Norbert Elias, La Civilisation des mœurs, Calmann-Lévy, 1973, puis Pocket, 2002 ; La Dynamique de l’Occident, Calmann-Lévy, 1975, puis Pocket, 2003 (traduction de Pierre Kamnitzer) [2] Spinoza, Ethique, II, 35, Ed. Gallimard, 1993, trad. Roland Caillois




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